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Journée internationale des personnes handicapées : Réflexion sur la situation mondiale et le cas d’Haïti

Ce mardi 3 décembre marque la célébration de la Journée internationale des personnes handicapées, une occasion de sensibilisation à la situation des millions de personnes vivant avec un handicap et de réaffirmer l’engagement collectif pour leur inclusion et leur bien-être. Cependant, cette journée met également en lumière les défis énormes auxquels ces individus continuent de faire face, tant à l’échelle mondiale qu’en Haïti.

État des lieux à l’échelle mondiale

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 1,3 milliard de personnes – soit 1 personne sur 6 dans le monde – vivent avec un handicap important. Ces individus sont confrontés à de nombreuses barrières structurelles et sociétales qui limitent leur accès à une vie décente. L’OMS souligne que les personnes handicapées ont un risque accru de pauvreté, de discrimination, et d’exclusion des services essentiels tels que l’éducation, la santé, l’emploi et les infrastructures adaptées. (Source: OMS – Disability and Health ).

Les pays en développement sont particulièrement touchés par cette problématique, avec des systèmes de santé et des politiques publiques souvent inadéquates pour répondre aux besoins des personnes handicapées. L’absence de lois inclusives et d’accessibilité universelle reste un défi majeur à surmonter.

« 1,3 milliard de personnes – soit 1 personne sur 6 dans le monde – vivent avec un handicap important ».

Le cas d’Haïti : une situation critique accentuée par le séisme de 2010

En Haïti, la question des personnes handicapées a pris une dimension tragique avec le séisme dévastateur du 12 janvier 2010. Ce désastre naturel a causé la mort de centaines de milliers de personnes et laissé des milliers d’autres avec des blessures graves, souvent irréversibles. Une étude menée en 2015 révèle que les blessures causées par le séisme étaient devenues la deuxième cause de handicap en Haïti après les maladies transmissibles et non transmissibles (Banque Mondiale – Disability Inclusion). Selon les estimations de l’OMS citées par l’ambassade des États-Unis en Haïti, « environ 15 pour cent de la population haïtienne vit avec un handicap ».

Quatorze ans après le séisme, le pays peine encore à répondre aux besoins des personnes handicapées. Les institutions spécialisées sont peu nombreuses, et l’accessibilité aux infrastructures publiques reste extrêmement limitée. De nombreuses personnes handicapées, y compris celles touchées par le séisme, continuent de vivre dans des conditions précaires, sans véritable soutien institutionnel.

« Environ 15 pour cent de la population haïtienne vit avec un handicap ».

Haïti et la Convention relative aux droits des personnes handicapées : une ratification sans application réelle

En 2009, Haïti a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) des Nations Unies, un traité international visant à promouvoir, protéger et garantir les droits fondamentaux des personnes handicapées. Ce document, considéré comme un jalon dans la reconnaissance des droits des personnes handicapées, repose sur des principes clés tels que :

  • L’égalité et la non-discrimination,
  • L’accès aux services publics essentiels,
  • L’autonomie et la participation pleine et entière à la société,
  • L’égalité des chances,
  • L’accessibilité universelle aux infrastructures physiques et numériques.

La convention engage les États signataires à adapter leurs politiques, leurs lois et leurs infrastructures pour garantir ces droits et à promouvoir une société inclusive et accessible à tous. Cependant, en Haïti, ces engagements peinent à se traduire en actions concrètes. Malgré la ratification, les personnes handicapées continuent de vivre dans des conditions alarmantes, marquées par une marginalisation sociale, un accès quasi inexistant aux services publics, et des infrastructures largement inadaptées.

« en Haïti, ces engagements peinent à se traduire en actions concrètes »

Des enjeux multiples et complexes

Les bâtiments publics restent inaccessibles aux personnes à mobilité réduite, en violation flagrante des principes d’accessibilité universelle.

Les programmes éducatifs inclusifs sont quasi absents, laissant de nombreux enfants handicapés sans accès à une éducation adaptée.

L’absence de politiques actives d’insertion professionnelle maintient les personnes handicapées dans un cercle de pauvreté et de dépendance. En effet, En raison de préjugés persistants, les personnes handicapées sont souvent perçues comme moins productives, ce qui limite considérablement leurs opportunités sur le marché du travail. En outre, l’absence de politiques incitatives pour l’embauche des personnes handicapées aggrave leur marginalisation économique.

La crise sécuritaire actuelle accentue davantage la situation des personnes handicapées. Dans un contexte où la violence des gangs domine le quotidien de nombreuses communautés, les personnes handicapées sont particulièrement vulnérables. Elles sont moins en mesure de fuir les zones dangereuses ou d’accéder à des refuges en cas d’attaques. De plus, les réseaux d’aide humanitaire et les services de base, déjà fragiles, sont paralysés par l’insécurité, ce qui laisse les personnes handicapées dans une situation d’abandon total.

L’un des enjeux les plus alarmants est la vulnérabilité accrue des femmes et des filles handicapées aux violences sexuelles. En Haïti, cette réalité est exacerbée par la pauvreté et l’insécurité généralisées. Les femmes handicapées sont souvent ciblées par des agresseurs en raison de leur incapacité à se défendre ou à signaler efficacement les abus. Ce silence est renforcé par le manque de structures d’accompagnement adaptées pour les victimes, ainsi que par des préjugés sociaux persistants.

Selon des organisations de défense des droits de la femme, les femmes et filles handicapées sont quatre fois plus susceptibles d’être victimes de violences sexuelles que les femmes sans handicap. Ces agressions, souvent non signalées, perpétuent un cycle de marginalisation et de traumatisme.

De plus, la situation est exacerbée par la crise sécuritaire qui fragilise davantage cette population déjà vulnérable. L’incapacité de l’État à protéger efficacement les personnes handicapées contre les violences ou à leur offrir des services adaptés témoigne d’un échec à respecter les engagements pris dans le cadre de la CDPH.

La ratification de la convention en 2009 aurait dû être un tournant pour les droits des personnes handicapées en Haïti. Cependant, l’incompréhension des enjeux, combinée à une instabilité chronique, a réduit cet engagement à un simple geste symbolique. Pour honorer cette ratification, il est urgent que le gouvernement haïtien mette en œuvre des réformes concrètes, en conformité avec les obligations de la CDPH, et fasse enfin de l’inclusion des personnes handicapées une priorité nationale.

« L’incapacité de l’État à protéger efficacement les personnes handicapées contre les violences ou à leur offrir des services adaptés témoigne d’un échec à respecter les engagements pris dans le cadre de la CDPH ».

Quelles solutions pour un avenir inclusif ?

La célébration de cette journée internationale ne doit pas se limiter à des paroles. Il est urgent que des actions concrètes soient entreprises pour améliorer les conditions de vie des personnes handicapées en Haïti. Parmi les mesures recommandées :

Renforcer le cadre légal et réglementaire :

  • Adopter une législation nationale alignée sur la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH), assortie de mécanismes clairs de suivi et de sanctions en cas de non-respect.
  • Édicter des lois criminalisant spécifiquement la violence, les abus et les discriminations à l’encontre des personnes handicapées, avec une attention particulière aux femmes et aux filles, souvent plus vulnérables.

Accroître l’accès aux services de base :

  • Rendre les infrastructures publiques (écoles, hôpitaux, bâtiments administratifs) et les moyens de transport accessibles aux personnes à mobilité réduite.
  • Développer des programmes d’éducation inclusive adaptés aux besoins des enfants handicapés pour leur permettre de participer pleinement à la vie scolaire.
  • Améliorer l’accès aux soins de santé, notamment en créant des centres spécialisés dans la réadaptation physique et mentale.

Protéger les personnes handicapées face à l’insécurité :

  • Mettre en place des refuges sécurisés et accessibles pour protéger les personnes handicapées des violences liées aux gangs.
  • Former les forces de l’ordre à reconnaître et à répondre aux besoins spécifiques des personnes handicapées, tout en leur offrant une protection renforcée.
  • Sensibiliser les communautés locales à la nécessité de protéger les personnes handicapées en période de violence ou de crise.

Encourager l’insertion professionnelle et l’autonomisation :

  • Créer des programmes d’insertion professionnelle pour les personnes handicapées, en collaboration avec les entreprises privées et les organisations internationales.
  • Mettre en place des incitations fiscales pour encourager les entreprises à employer des personnes en situation de handicap.
  • Promouvoir des initiatives d’entrepreneuriat inclusives pour soutenir leur indépendance financière.

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